Les films photovoltaïques organiques ouvrent de nouvelles perspectives aux énergies renouvelables
Flexibles, ultra-minces, légers, semi-transparents et peu coûteux, les films photovoltaïques organiques nous permettent d'imaginer de nouvelles possibilités de production d'énergie renouvelable. Cette troisième génération de cellules photovoltaïques est produite par des procédés bas carbone qui ne nécessitent ni métaux stratégiques ni solvants chlorés. Elle ouvre un nouveau champ d'innovation aux industriels pour relever les défis de la transition énergétique.
Lorsque nous parlons de photovoltaïque pour la production d'électricité verte, il s'agit jusqu'à présent principalement de panneaux conventionnels de première ou deuxième génération réalisés avec des cellules à base de silicium. Aujourd'hui, il existe également une technologie beaucoup plus flexible: le photovoltaïque "organique" (également connu sous l'acronyme OPV). Il consiste à imprimer et à superposer des couches d'un matériau semi-conducteur sur un film plastique fin et flexible. Comme leurs parents inorganiques, ces «cellules» utilisent l'effet photovoltaïque pour générer de l'électricité à partir du rayonnement solaire, mais au lieu du silicium, elles contiennent des dérivés du carbone, d'où leur nom de cellule «organique».
La flexibilité et la flexibilité des films OPV leur permettent de marier des formes arrondies ou complexes et de couvrir des dômes ou du mobilier urbain par exemple, mais aussi, pourquoi pas, des carrosseries de véhicules. Il est également possible de les intégrer relativement facilement dans des vêtements ou toutes sortes d'objets divers tels que des sacs à main ou des sacs à dos, ouvrant ainsi aux industriels un nouveau champ d'innovation pour relever les défis de la transition énergétique. . Le VPO étant partiellement translucide, il peut être déployé sur des surfaces vitrées, comme c'est déjà le cas dans les serres agricoles. En laissant passer une partie de la lumière incidente, la technologie permet de développer de nouveaux revenus pour les maraîchers. L'un des avantages de cette technologie est qu'elle ne nécessite aucun métal rare ou stratégique pour fabriquer les modules, mais utilise également beaucoup moins d'énergie. Le temps de retour d'énergie(1) (ou EROEI) de l'OPV est donc plus réduit: 4 à 6 mois contre 1 à 2 ans (selon l'ensoleillement) pour les panneaux photovoltaïques conventionnels. De plus, les films organiques sont insensibles à la chaleur: leur rendement ne baisse donc pas en cas de canicule.
Publicité
Disasolar et Heliatek: deux startups aux destins divergents
Disasolar, société créée en 2010 et basée dans le Limousin, a été pionnière du photovoltaïque organique. Avec le soutien de la Région, de l'INES (Institut National de l'Energie Solaire), du CNRS et du financement de la DGA (Direction Générale des Armements), il a développé une technique d'impression des cellules, similaire à celle utilisée par les imprimantes à jet d'encre. En 2015, elle avait réalisé une première mondiale en produisant un module solaire organique polychrome. Disolar prévoyait de construire une usine de films photovoltaïques organiques à Limoges et d'embaucher 150 personnes. Avant cela, une ligne de production pilote devait ouvrir en 2016. Malheureusement, la société n'a pas survécu par manque de financement.
Heliatek, une autre startup, allemande celle-là, mais dirigée depuis longtemps par le Breton Thibaud Le Séguillon, jouit d'une renommée internationale dans le domaine du film solaire organique au point que la société française d'énergie Conseil Chauffage, mais aussi des fonds d'investissement et quelques grands des groupes transnationaux comme BASF, BNP Paribas et RWE allemand y ont investi plus de 95 millions d'euros (en deux levées de fonds espacées d'un an). La start-up a également obtenu une subvention de 18 millions du Fonds européen de développement régional (FEDER) et un prêt de 20 millions de la BEI.
Début 2016, Heliatek est apparu dans les médias, atteignant une efficacité record de conversion de l'énergie solaire avec son film photovoltaïque organique en laboratoire: 13,2%. En 10 ans, la startup a augmenté ce rendement de 3% à plus de 13%! À terme, il vise 15%. Il s'agit certainement d'une performance inférieure à celle des panneaux conventionnels de première ou deuxième génération qui affichent actuellement des rendements proches de 20%. Mais ce handicap est largement compensé par la polyvalence des usages qui permettent la souplesse et la légèreté de la technologie des films organiques, leur insensibilité à la température et leur simplicité de production.
Contrairement à ses concurrents, Heliatek n'imprime pas ses films organiques: sa technologie brevetée consiste à y déposer de petites molécules par évaporation sous vide. En apparence plus compliquée, cette méthode est, semble-t-il, plus facile à maîtriser industriellement et les performances sont meilleures.
Baptisé HeliaSol, le film photovoltaïque organique (OPV) développé par la start-up allemande convient aux toitures légères, planes ou courbes, où le panneau solaire conventionnel ne peut pas être installé. Il permet également une installation plus rapide et est plus facilement recyclable.
Fin 2017, Conseil Chauffage a posé sur le toit du collège Pierre Mendes-France, à La Rochelle, 530 m2 des modules HeliaSol. Présentée à l'époque comme la plus grande surface OPV au monde et réalisée dans le cadre d'un appel à projets lancé par le département de la Charente-Maritime, cette installation visait à démontrer les avantages du produit. " On ne pouvait pas y installer des panneaux photovoltaïques conventionnels sans modifier la structure du cadre Explique Conseil Chauffage. " Et là, en trois jours, nous avons pu, sans modification, recouvrir la toiture de 530 m² de films solaires, qui produiront près de 24 MWh par an, soit 15 à 20% des besoins en électricité du collège. ".
Grâce à sa levée de fonds, Heliatek a investi dans la construction d'une usine à Dresde, qui pourra produire un million de mètres carrés de VPO par an d'ici la mi-2020. L'outil a été lancé le 20 août de cette année.
French Armor fait son apparition sur le marché émergent des OPV
Parmi les concurrents d'Heliatek, l'industrie française peut compter sur Armor. Cette société nantaise fondée en 1922 est spécialisée dans les encres et cartouches pour imprimantes. Il y a une dizaine d'années, elle a entrepris des travaux de diversification dans l'impression de modules photovoltaïques organiques. Accompagnée de scientifiques de l'INES et du CNRS, elle a aujourd'hui développé un film OPV ultra-fin et très léger (450 g / m²) avec une durée de vie de 20 ans. Cependant, l'entreprise poursuit ses efforts de recherche pour améliorer l'efficacité de conversion énergétique de son produit, qui se situe actuellement autour de 5 à 8%.
Sous la marque Asca, Armor a déployé une capacité de production d'un million de mètres carrés par an sur le site industriel de La Chevrolière près de Nantes … le même que celui d'Heliatek.
Selon Hubert de Boisredon, le PDG de la société, l'Asca a déjà séduit des clients du monde entier. Armor propose, par exemple, le film OPV utilisé par un concept interactif de mobilier urbain de JCDecaux, en permettant la communication d'informations et d'événements concernant un quartier via des smartphones. Le produit a également été adopté par la société Litogami qui l'intègre à ses objets écologiques, qui s'allument lorsqu'ils sont éclairés par la lumière naturelle ou artificielle. Armor équipe également des serres agricoles en partenariat avec Eiffage Energie. D'autres projets sont à l'étude sur les bâtiments publics, les écoles, les usines …
L'entreprise a notamment signé un contrat avec l'UNESCO pour une opération de soutien à l'éducation en Afrique. Une poche avec un film photovoltaïque organique permet aux écoliers togolais de recharger une lampe mobile pendant la journée. Et le soir, dans une zone où l'accès à l'électricité fait souvent défaut, il leur fournit la lumière dont ils ont besoin pour étudier.
Mais le PDG d'Armor a d'autres ambitions: ses yeux se tournent désormais vers Dubaï et ses gratte-ciels dont les surfaces vitrées deviendront un problème. Souhaitant diversifier leur économie, encore très dépendante du pétrole, les dirigeants du Petit Emirat envisagent notamment de développer les énergies renouvelables. "Notre film photovoltaïque pourrait parfaitement convenir pour couvrir tous ces bâtiments "Estimations Hubert de Boisredon.
(1) Le temps de retour d'énergie (EROEI) est le temps pendant lequel une installation de production d'énergie a fourni autant d'énergie que celle nécessaire à sa fabrication.