Covid-19 : et si la pollution de l’air expliquait en partie la hausse du nombre de cas ?
CORRÉLATION – De l'avis de plusieurs spécialistes, l'épisode de pollution que traverse le pays pourrait être l'une des explications de l'augmentation actuellement observée de la contamination. En fait, ce lien a déjà été mis en évidence dans plusieurs études.
– Audrey LE GUELLEC
Y aurait-il un plus grand risque d'être infecté par Sars-Cov-2, et qui plus est de développer une forme grave de la maladie, lors des pics de concentration de particules fines? La question réapparaît alors que Santé publique France enregistre, pour la troisième semaine consécutive, une augmentation du nombre de nouveaux cas de Covid-19 allant de pair avec des épisodes de pollution, comme celui de mardi en Ile-de-France. Mais en plus du trafic routier et du chauffage au bois, généralement mis en cause, un certain point dans le contexte actuel un autre responsable possible: la montée des poussières de sable du Sahara, ayant récemment touché de nombreux départements, en région parisienne. justement mais aussi dans les Hauts-de-France, Grand-Est, en Rhône-Alpes-Auvergne.
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"Qu'elles soient d'origine naturelle comme le sable du désert ou anthropique, les particules fines sont associées à des rebonds épidémiques de maladies respiratoires transmissibles, et en particulier de Covid-19", entre autres a expliqué l'épidémiologiste Antoine Flahault dans une interview au journal Le monde, publié le samedi 6 mars. Avec d'autres chercheurs, ce dernier a déjà expliqué, en novembre dernier dans la revue scientifique Système terrestre et environnement, Que les particules de sable pourraient agir comme vecteur de produits dangereux tels que les pesticides ou les métaux lourds. Par conséquent, pourquoi ne pourraient-ils pas servir de transport passif pour le virus dans l'air?
Un lien déjà mis en évidence
En fait, des liens entre la pollution de l'air, la transmission et la gravité des symptômes ont déjà été démontrés. La question avait également agité les scientifiques au printemps 2020, après l'explosion de l'épidémie dans la plaine du Pô, cette zone industrialisée du nord de l'Italie. "Plusieurs études internationales semblent corréler les pics de pollution avec des vagues de cas", confirme notamment le professeur de virologie Vincent Maréchal contacté par le LCI. L'un des plus récents, publié en février dans l'examen respiratoire européen, répertorie précisément différents travaux sur le sujet. Tout en insistant sur le fait que pour le moment il ne s'agit que d'une corrélation, le virologue ajoute que "Ce qui semble dire que ce n'est pas une coïncidence, c'est que ces phénomènes ont été observés dans plusieurs endroits du monde".
Ainsi, aux États-Unis, en Chine, en Italie, en Espagne et au Royaume-Uni, des spécialistes ont déjà observé des épisodes de pollution, notamment aux particules fines, suivis d'une flambée de cas de Covid-19, voire d'hospitalisations et même de décès. «Ce que nous constatons dans la pratique, c'est que les particules PM10 et PM2,5 sont les plus corrélées dans nombre de cas, en d'autres termes lorsque ces particules augmentent le taux de contamination augmente avec», de son côté, résume le professeur de santé publique Philippe Amouyel, insistant à son tour sur le fait qu'il ne s'agit que "de corrélations et non d'associations" et qu'en aucun cas cela ne met en lumière "intensité" à partir de ce lien. "C'est intéressant, il se passe quelque chose mais l'impact ne se mesure pas".
Concernant le cas plus spécifique des poussières du Sahara, les scientifiques ont déjà observé, au début de la pandémie, en février 2020, une multiplication du nombre de cas aux Canaries après une tempête de sable, comme ceux qui rendent le jaune-orange ciel. Jusqu'à présent, l'Organisation mondiale de la santé s'est montrée prudente sur ce lien supposé entre les particules fines et la propagation du virus.
Pourquoi est-ce plausible?
Lors de ces épisodes de pollution, des particules fines, inférieures à 2,5 micromètres, se propagent notamment dans l'air. «Des hypothèses semblent montrer que la pollution par micro-particules pourrait jouer un rôle dans la suspension du virus dans l'air, on évoque celles de 2,5 micromètres et on se demande si elles ne peuvent pas favoriser le temps de suspension, en servant de transport passif de le virus dans l'air ", détaille Vincent Maréchal. Cependant, il s'avère que ces particules ont précisément la particularité de pénétrer profondément dans l'organisme lorsqu'elles sont inhalées.
"Ils peuvent aller beaucoup plus loin dans les poumons et piéger les toxines, c'est le principe des polluants par particules", explique Philippe Amouyel. Soulignant que la pollution de l'air peut aussi exacerber les conséquences de Covid-19, il précise que ce n'est pas spécifique à Covid-19 mais que l'on retrouve cela "corrélation au niveau des poumons" propice aux mécanismes inflammatoires locaux "dans le cas d'autres maladies respiratoires". Et pour détailler: "Le fait d'avoir une concentration de particules peut irriter la muqueuse et provoquer un phénomène inflammatoire donc si une maladie pulmonaire est déjà présente à laquelle s'ajoutent la pollution et le Covid, ce n'est pas bon …"
Méfiez-vous tout de même des raccourcis
Évoquer une question "multiforme", Vincent Maréchal demande que cette corrélation entre pollution et augmentation de la contamination soit interprétée avec prudence. Premièrement, les jours de concentrations maximales de particules fines vont souvent de pair avec des conditions météorologiques spécifiques. "Les journées avec relativement peu de vent sont propices aux pics de pollution", fait-il remarquer. Or, "Il semble également que les conditions météorologiques jouent un rôle important dans la stabilité du virus dans les aérosols" car en l'absence de vent, le virus ne se disperse pas, même à l'extérieur, Il explique, des études ayant également montré que le virus aime particulièrement les températures comprises entre 3 et 17 avec un taux d'humidité particulier. "La question qui se pose est celle de l'effet de la pollution directe ou y a-t-il deux phénomènes qui se produisent en même temps et qui donnent l'impression que la pollution est responsable", résume-t-il, ajoutant que des études sont en cours pour clarifier le lien entre la météo et la circulation du virus.
À ces paramètres "démêler " un troisième est ajouté. "Un beau temps change les comportements, d'autant plus lorsque vous êtes stressé par un cadre particulier comme celui que vous connaissez", poursuit-il en s'appuyant sur l'exemple éloquent des quais de Seine bondés les derniers week-ends.
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La prudence est également de mise pour Philippe Amouyel, qui avance encore un autre argument. "Là où il y a de la pollution, c'est dans les grandes villes, mais c'est dans les grandes villes que le trafic est exacerbé car il y a plus d'interactions qui sont en elles-mêmes un facteur aggravant pour la transmission", se souvient-il, insistant sur le fait que"un facteur n'est pas nécessairement exclusif de l'autre et que les deux sont peut-être impliqués" dans l'augmentation des cas dont nous sommes témoins. «D'ailleurs à Dunkerque et sur la côte niçoise, quand c'est arrivé, il n'y avait pas de pic de pollution à ma connaissance», souligne-t-il, appelant à ne pas oublier l'impact significatif des variantes sur la détérioration actuelle des indicateurs épidémiques. De ce point de vue, l'épidémiologiste est sceptique quant au choix de ne pas redéfinir: «Si nous sommes dans un flux de services juste à temps et que nous connaissons également un pic de cette pollution, nous devrons peut-être nous poser des questions». Et pour conclure: "quel est le meilleur moyen d'arrêter à la fois la circulation du virus et la pollution?"
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